Burundi: Déclaration des organisations de la société civile en rapport avec le contexte préélectoral prévalant au Burundi

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Déclaration 20282 du 28 février 2020

1. Les organisations de la société civile indépendante constatent avec regret que les élections annoncées pour 2020 sont organisées dans un contexte de crise continue suite à la violation de l’Accord d’Arusha et de la constitution de 2005 qui en était l’émanation. ;

2. Les organisations de la société civile déplorent que cet Accord de paix signé en 2000 qui avait largement contribué à la stabilité politique, a été enterré définitivement par la constitution de juin 2018. Elles rappellent que la campagne référendaire a été précédée par de multiples violations des droits de l’homme à l’encontre des opposants.

3. Les mêmes organisations de la société civile constatent que les multiples déclarations de candidatures aux présidentielles, sans programmes politiques ni projets de société, découlent de la volonté du régime à crédibiliser un processus électoral non démocratique. En effet, le contexte pré-électoral reste caractérisé par l’insécurité continue, la répression des opposants, le verrouillage de l’espace politique et civique, l’existence des centaines de milliers de réfugiés causés par la crise actuelle et l’emprisonnement d’une dizaine de milliers d’opposants au troisième mandat etc, ne sont pas propices à la tenue des élections libres, démocratiques, apaisées et transparentes.

4. Elles dénoncent les multiples violations des droits de l’homme commises par la milice du CNDD-FDD, les Imbonerakure, qui continuent à semer la terreur au sein de la population et qui ont récemment commis des exécutions sommaires sur des dizaines de personnes arrêtées en province de Bujumbura.

5. Elles s’inclinent devant la mémoire des victimes des crimes commis contre des citoyens au cours de différentes époques et réaffirment leur attachement à la vérité et à la justice mais s’inscrivent en faux contre l’instrumentalisation de la CVR qui se montre aujourd’hui déterminée à manipuler la vérité sur les crimes du passé en s’adonnant à l’exhumation des restes des victimes qui sont attribués à une époque sans vérification médico légale préalable, ce qui aboutit à la falsification de l’histoire à des fins propagandistes . En plus, aucun mécanisme d’accompagnement psychologique des victimes des crises, exigé dans de telles circonstances n’a été mis en place par la CVR.

6. Elles sont fortement préoccupées par la détérioration grave de l’économie nationale et dénoncent les pratiques du régime qui nuisent gravement à la liberté des échanges et la concentration de toute la richesse nationale entre les mains de certains individus au détriment de l’économie nationale et d’une population abandonnée à son sort et qui partant continue à croupir dans la misère. ;

7. Compte tenu de la situation ci-haut décrite, les organisations de la société civile expriment encore une fois leur préoccupation quant à l’organisation du processus électoral forcé alors que les conditions indispensables ne sont pas réunies ;

8. Malgré l’annonce fracassante du départ de Pierre Nkurunziza du pouvoir, il laisse un pays en ruine, des crimes impunis, un pays déchiré, des clivages ethniques ravivés.

9. Le forcing vers un hold up électoral qui résulte du forcing pour la révision de la constitution ne doit pas occulter les questions préoccupantes qui doivent être résolues pour garantir le retour du Burundi sur la voie de la paix, de la justice et de la démocratie. Les parties au conflit burundais, aidées en cela par les partenaires du Burundi, doivent reprendre le dialogue national inclusif et constructif afin de trouver une solution à une série de questions dont leur persistance prolongera la crise actuelle.

Il s’agit notamment de :

  • Le rétablissement de l’Accord d’Arusha pour la paix et la réconciliation au Burundi ainsi que la constitution de 2005 qui en est issue ;
  • L’arrêt de la répression en cours au Burundi depuis 2015 contre des opposants réels et supposés ;
  • La lutte contre l’impunité des crimes passés et actuels ;
  • La réforme et la dépolitisation de l’appareil judiciaire qui est actuellement instrumentalisé et sert d’outil de répression des opposants au régime ;
  • Le retour volontaire des réfugiés ;
  • La dépolitisation de l’armée et de la police ainsi que le rétablissement des corps de défense et de sécurité à même d’assurer la protection de tous les citoyens sans distinction aucune.
  • La libération de tous les prisonniers politiques ;
  • La réhabilitation des partis politiques ;
  • La réhabilitation des organisations de la société civile ;
  • La réhabilitation des médias indépendants ;
  • Démilitarisation des institutions, le démantèlement des milices et le désarmement des populations ;
  • La poursuite et la condamnation des auteurs des crimes contre l’humanité ;
  • La restauration de l’économie nationale ;
  • La mise en place des mécanismes de justice transitionnelle conforme à l’accord d’Arusha pour la paix et la réconciliation.

10. Les organisations signataires restent déterminées à défendre la dignité du peuple Burundais en général et celle des victimes de la répression en cours en particulier tout en œuvrant pour la lutte contre l’impunité sous toutes ses formes, la réhabilitation de l’Accord d’Arusha pour la Paix et la Réconciliation ainsi que la restauration d’un Etat de droit sans oublier la cohésion du peuple.

Fait le 28 février 2020

Organisations signataires

  1. Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture au Burundi(CAT-Burundi)
  2. Association Burundaise pour la Protection des Droits humains et des personnes Détenues( APRODH)
  3. Association des Journalistes Burundais en Exil ( AJBE)
  4. Coalition Burundaise des Défenseurs des Droits Humains( CBBDH)
  5. Coalition Burundaise pour la Cour Pénale Internationale (CB-CPI)
  6. Coalition de la Société Civile pour le Monitoring Electoral (COSOME)
  7. Collectif des Avocats des Victimes des crimes de droit International commis au Burundi (CAVIB) ;
  8. Forum pour la Conscience et le Développement (FOCODE)
  9. Forum pour le Renforcement de la Société civile (FORSC)
  10. Ligue Burundaise des Droits de l’homme « ITEKA »
  11. Mouvement des Femmes et Filles pour la Paix et la Sécurité au Burundi (MFFPS) ;
  12. Réseau des Citoyens Probes (RCP) ;
  13. SOS-Torture Burundi
  14. Union Burundaise des Journalistes (UBJ)
  15. Tournons la Page Burundi(TLP-Burundi)
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