DECLARATION DE LA SOCIETE CIVILE INDEPENDANTE SUR LE REFUS DU GOUVERNEMENT DU BURUNDI A METTRE EN APPLICATION L’ARRET DE LA COUR DE L’EAC N°1/2020 du 25/11/2021 QUI A CONFIRME L’ILLEGALITE DU TROISIEME MANDAT DU PRESIDENT DU BURUNDI EN 2015

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DECLARATION DU 25/11/2025
A l’occasion du quatrième anniversaire de l’arrêt N°01/2020 de la chambre d’appel de la Cour de Justice de l’Afrique de l’Est qui a été rendu à Bujumbura en date du 25 novembre 2021 et qui a déclaré définitivement le troisième mandat de Nkurunziza comme étant illégal, les
organisations de la société civile burundaise signataires publient la présente déclaration afin de rappeler le caractère contraignant de cette décision et de dénoncer son non-respect par le Gouvernement du Burundi.
1. Les organisations signataires regrettent profondément que la crise sociopolitique en cours déclenchée en 2015 par la violation de la constitution du pays et de l’Accord d’Arusha pour la paix et la réconciliation au Burundi demeure non résolue. Dix ans après son
déclenchement, cette crise continue sans que le régime en place qui l’a causée ne manifeste aucune volonté de chercher une voie de sortie. Cette crise non résolue est caractérisée par plusieurs cas de violations qui affectent gravement la population burundaise, sans qu’aucune volonté politique réelle ne soit manifestée pour y mettre un terme.
2. Cette crise prolongée se caractérise par des violations graves et systématiques des droits humains; dont les meurtres, les assassinats ciblés, les violences sexuelles, les tortures, les enlèvements, les disparitions forcées, les détentions arbitraires, de centaines de
milliers de réfugiés qui croupissent toujours dans des camps de réfugiés, le verrouillage de l’espace démocratique, les mascarades électorales à répétition, l’appauvrissement de la population, la corruption endémique, la prédation des ressources de l’Etat etc
3. Alors que la situation ne cesse de se détériorer, l’arrêt de la Cour de l’EAC représentait une opportunité majeure pour remettre le pays sur la voie de l’état de droit et de la démocratie. En effet, depuis le 06 juillet 2015, un dossier d’intérêt public relatif au non-respect par le Gouvernement du Burundi de l’Etat de droit et des principes démocratiques, obligatoires à tous les Etats membres tels que stipulés par les articles 6(d) et 7 (2) du traité établissant la Communauté Est Africaine était en cours d’analyse par la Cour. Après plus de six ans de bataille judiciaire, le dossier en cause a été clôturé en date du 25 novembre 2021 par le constat de la Chambre d’appel de la Cour de justice
de la Communauté Est Africaine d’une violation grave par le régime Burundais , de ces dispositions susvisées, de la Constitution du Burundi et de l’Accord d’Arusha pour la Paix et la Réconciliation au Burundi dont la même communauté Est africaine est par ailleurs garante.
4. A cet égard, il convient de souligner qu’ à travers le paragraphe 97 de cet arrêt, la Cour a notamment estimé que l’Arrêt de la Cour Constitutionnelle du Burundi du 05 mai 2015 (qui avait été arraché par des menaces de mort dirigés contre les juges de cette Cour et
qui ont par ailleurs contraint le vice-président de cette Cour à s’exiler) et qui a entériné le troisième mandat de Pierre Nkurunziza était en violation de la Constitution du Burundi, de l’Accord d’Arusha pour la Paix et la Réconciliation ainsi que le traité établissant la Communauté Est Africaine.
5. Du moment que, la communauté Est Africaine à travers sa juridiction a déjà identifié la cause de cette crise qui persiste, les organisations saisissent cette opportunité pour appeler la région à s’impliquer davantage dans la gestion des conséquences de cette illégalité qui a été suivie par une répression sanglante largement documentée par une commission d’enquête des Nations Unies et toujours sous enquête par la Cour Pénale internationale.
6. Les organisations signataires rappellent par ailleurs qu’à travers l’arrêt n°1 du 15 mai 2015, la même Cour avait déjà estimé que les violations des lois internes et internationales par le Burundi sont si graves et récurrentes qu’il est urgent pour le Secrétaire Général de la Communauté Est Africaine d’envoyer une « Task force », une mission d’investigation et d’évaluation de la situation du respect de l’Etat de droit et des droits de l’homme au Burundi. A ce jour, cette mission n’a jamais été mise en place malgré cette décision de la Cour.
7. Face à ce qui précède, les organisations signataires appellent les partenaires du Burundi en général et les garants de l’Accord d’Arusha pour la Paix et la Réconciliation en particulier, de jouer un rôle important dans la résolution de la crise burundaise dont les effets perdurent depuis dix ans afin que le pays puisse sortir des affres de l’extrême pauvreté, de l’oppression et du totalitarisme qui risqueraient de générer de graves tensions si le gouvernement en place continue à ignorer les voix d’une partie de Burundais qu’il qualifie arbitrairement d’ennemis du pays.
8. Les organisations signataires estiment que la mise en application de cet arrêt dans la paix et la sérénité à travers la réparation des effets néfastes que cette violation de la loi a occasionné et continue de produire dans la région pourrait être une voie de sortie. Le régime en place au Burundi qui a imposé un troisième mandat illégal ayant été identifié comme la cause des maux qui continuent à s’abattre sur le Burundi, la région devraient contraindre le régime en place à mettre en application cet arrêt à travers les mesures ci-
après qui constituent les recommandations émises par cette déclaration:
➢ L’imminent retour à la Constitution de 2005 qui est conforme à l’Accord d’Arusha pour la Paix et la Réconciliation tel que stipulé par l’Arrêt de la Chambre d’Appel de la Cour de Justice de la Communauté Est Africaine et renoncement conséquent à la Constitution
de 2018 imposée illégalement au peuple Burundais dans un contexte de tensions politiques. La réparation des conséquences du troisième mandat illégal de 2015, ainsi que la restauration de l’ordre constitutionnel et du dialogue politique, sont indispensables pour prévenir de nouvelles violations et rétablir durablement la confiance ;
➢ Le respect de l’Etat de droit qui va se concrétiser par l’indépendance de la magistrature et la dépolitisation complète des corps de défenses et de sécurité;
➢ La levée des mesures interdisant les activités de toutes les organisations de la société civile radiées ou suspendues ainsi que la réouverture de l’Espace politique qui permettrait aux partis politiques de l’opposition disloqués par le pouvoir en place de travailler librement au Burundi ;
➢ La réouverture des médias indépendants contraints à l’exil simplement pour avoir donné la parole aux défenseurs de la légalité constitutionnelle en 2015 ;
➢ L’annulation des procès politiques fantaisistes visant les libertés civiles des défenseurs de la légalité constitutionnelle de 2015 ainsi que la spoliation de leurs biens ;
➢ La libération la plus immédiate possible et inconditionnelle des personnes arbitrairement détenues à cause du troisième mandat illégal de 2015 y compris celles
qui sont détenues au secret et celles impliquées dans le putsch manqué de 2015 tout en garantissant leur intégrité physique ;
➢ La levée des mandats d’arrêt internationaux contre les membres de la Société Civile, des journalistes et des membres des partis politiques d’opposition en exil impliqués injustement accusés d’avoir été impliqués dans le putsch manqué de 2015 ;
➢ La réhabilitation des victimes du troisième mandat illégal de 2015 et leurs familles à travers une réparation adéquate et effective, notamment par la restitution, le dédommagement, la satisfaction et les garanties de non-répétition;
➢ L’arrêt des activités paramilitaires de la milice Imbonerakure et de toutes formes de violence qui se poursuivent sur le territoire du Burundi ;
➢ L’engagement des poursuites contre les auteurs de la répression sanglante qui s’est abattue contre les manifestants pacifiques qui défendaient le respect de l’Etat de droit en 2015 ;
➢ La création des conditions favorables au retour des réfugiés et la cessation de toutes formes de représailles contre les réfugiés qui rentrent d’exil ;
➢ La reprise la plus immédiate possible des pourparlers entre le Gouvernement burundais et la société civile en exil, partis politiques en exil, partis politiques de l’opposition de l’intérieur et les garants des Accords d’Arusha en vue de ramener le Burundi sur les rails
de la paix, de la justice et de l’Etat de droit.
LES ORGANISATIONS SIGNATAIRES :
1. Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture au Burundi (ACAT Burundi)
2. Association des Journalistes Burundais en Exil (AJBE)
3. Association burundaise pour la protection des droits de l’homme et des personnes détenues (APRODH)
4. Coalition Burundaise des Défenseurs des Droits de l’Homme (CBDDH)
5. Coalition pour la Défense des Droits Humains/Vivant dans les Camps des Réfugiés (CDH/VICAR)
6. Coalition Burundaise pour la Cour Pénale Internationale (CB-CPI)
7. Coalition de la Société Civile pour le Monitoring Electoral (COSOME)
8. Collectif des Avocats pour la défense des Victimes de crimes de droit International commis au Burundi (CAVIB)
9. Ensemble pour le Soutien des Défenseurs des Droits Humains en danger (ESDDH)
10. Forum pour la Conscience et de Développement (FOCODE)
11. Forum pour le Renforcement de la société civile au Burundi (FORSC)
12. Light for all
13. Ligue ITEKA
14. Mouvement INAMAHORO
15. Mouvement des femmes et filles pour la Paix et la Sécurité au Burundi (MFFPS)
16. Réseau des Citoyens Probes (RCP)
17. SOS Torture-Burundi
18. Tournons la Page-Burundi (TLP-Burundi)
19. Union Burundaise des Journalistes (UBJ)
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