URGENT : Stop au rapatriement forcé des réfugiés burundais en Tanzanie

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Ultimatum de rapatriement forcé par la Tanzanie en décembre 2024 : Un danger imminent pour les réfugiés burundais, la communauté internationale doit agir !

Les organisations de la société civile burundaise signataires de cette déclaration sont profondément alarmées par la crise humanitaire qui affecte les réfugiés burundais en Tanzanie. Cette situation, qui perdure et s’aggrave depuis la fin de 2019, devrait être une préoccupation majeure pour tous ceux attachés aux valeurs des droits humains.

Contraints de fuir leur pays natal, le Burundi, en raison de la violence et de l’instabilité découlant de la crise de 2015, ces réfugiés ont trouvé refuge en Tanzanie. Cependant, loin d’être un sanctuaire, ce pays d’accueil est devenu le théâtre d’une série d’atrocités perpétrées par les forces de police et de renseignement du Burundi et de la Tanzanie. Les opérations menées sous couvert de la nuit se traduisent par des disparitions forcées, des
détentions arbitraires et des actes de torture, faisant des camps de réfugiés des lieux de terreur plutôt que de sécurité.

Les rapports des ONG, comme Human Rights Watch, sont accablants. Des sources crédibles révèlent que ces pratiques odieuses ont touché au moins 18 personnes identifiables, bien que le nombre réel soit sans doute plus élevé. Les arrestations et les disparitions des réfugiés burundais se produisent souvent dans des conditions obscures et terrifiantes, sans mandat d’arrêt, exacerbant l’angoisse et la terreur parmi les
populations de réfugiés.

Ces actions constituent des violations flagrantes des droits humains, causant des souffrances indescriptibles non seulement aux détenus mais également à leurs familles restées sans nouvelles. Les détenus, accusés sans preuves de culpabilité, subissent des interrogatoires brutaux et sont contraints de vivre dans des
conditions dégradantes, marquées par des tortures de tout acabit, y compris des chocs électriques, des brûlures par du piment et autres sévices physiques graves.

La déclaration faite en 2020 par l’Inspecteur Général de la Police tanzanienne Monsieur Simon NYOKORO SIRRO, annonçant son intention de « nettoyer » les camps de réfugiés des « éléments burundais indésirables », a exacerbé cette violence. Cette politique a été illustrée de manière horrifique par des tueries et la découverte de corps sans vie en 2021 et encore récemment en 2024. Ces actes de violence sont des symptômes d’une crise humanitaire profonde et d’une violation flagrante des droits humains.

Dans le but de rendre leur vie impossible et de les contraindre à rentrer, les autorités tanzaniennes n’ont ménagé aucun effort pour atteindre cet ignoble objectif. Elles ont coupé toutes les sources de subsistance : la destruction des champs des réfugiés, la fermeture des stands de petits commerces, la confiscation de leurs motos, les restrictions sévères de tout mouvement, la fermeture des écoles et des structures de soins. Les
femmes et les enfants sont particulièrement vulnérables, exposés à des violences sexuelles et à d’autres formes de violence physique et psychologique.

Nous tenons à souligner les mesures discriminatoires prises spécifiquement contre les réfugiés burundais, qui démontrent clairement qu’ils sont rapatriés de force. Par exemple, à Nyarugusu, les activités agricoles des Congolais se poursuivent normalement, tandis que les Burundais se voient interdire ces mêmes activités. Cela montre une discrimination flagrante et une pression exercée sur les Burundais pour les contraindre à partir.
L’ultimatum donné par le gouvernement tanzanien pour le rapatriement forcé des réfugiés d’ici décembre 2024 constitue une autre violation des principes de non-refoulement et de protection des réfugiés énoncés dans les conventions internationales. Le principe de non-refoulement est un pilier fondamental du droit international des réfugiés, qui interditde renvoyer une personne vers un pays où elle risque d’être persécutée. En imposant un rapatriement forcé, la Tanzanie ignore ce principe et met en danger la vie de milliers de
réfugiés burundais.

Cette mesure, qui s’inscrit dans une politique de pression constante, vise clairement à rendre la vie des réfugiés insupportable afin de les contraindre à retourner dans leur pays d’origine, où ils font face à des risques graves et à des violences systématiques.
Depuis l’investiture du Président Ndayishimiye en 2020, les réfugiés burundais avaient placé leur espoir en une amélioration de la situation, ce qui a encouragé certains à retourner. Néanmoins, plusieurs parmi ceux qui sont rentrés ont été confrontés à des difficultés diverses, y compris des assassinats, des enlèvements et certains ont dû fuir de nouveau le pays.

Ces exemples concrets illustrent la gravité de la situation :

  • Mbarushimana Emmanuel de la province Karusi-Buhiga, rapatrié en 2020, tué en 2020 ;
  • Ntwari René Pacifique de la province Kirundo-Busoni/Kabanga, rapatrié en 2020, tué en 2021 ;
  • Harerimana Jean Pierre de la province de Kayanza, rapatrié en 2020, tué en janvier 2021 ;
  • Nyandwi Ferdinand, alias Kambayingwe, rapatrié en 2021 et tué le 26 novembre 2022 à Kirundo par des forces de l’ordre et la milice Imbonerakure du CNDD-FDD;
  • Christophe Niyonzima de la province Kirundo-Bugabira, arrêté le 23 août 2021 à Masanganzira entre Kirundo et Ngozi par le service de renseignement militaire et introuvable à ce jour.

Ces cas tragiques montrent que le retour des réfugiés au Burundi est loin d’être sûr et que les risques de persécution restent élevés. Les organisations signataires de cette déclaration d’alerte dénoncent également avec véhémence le comportement du Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés en Tanzanie, qui semble céder sous la pression de cette politique répressive et y partciper au lieu de contribuer à l’atténuation des souffrances des réfugiés.

En conclusion, les organisations signataires de la présente déclaration ont pris bonne note du contenu de la récente déclaration2 parue le 22 mai 2024 sur le site web du HCR/Africa, intitulée « Déclaration sur les retours volontaires de la Tanzanie vers le Burundi ».

Toutefois, les 19 organisations signataires expriment leur inquiétude quant à la fermeté des assurances données par le HCR en réponse à l’ultimatum prononcé par la Présidente de la République de Tanzanie, Son Excellence Madame Samia SULUHU, lors d’une réunion du haut commandement des Forces de défense tanzaniennes le 22 janvier 2024 à Dar es Salaam, la capitale économique. Aussi longtemps qu’elles n’auront pas une assurance officielle de la présidence de la République , elles resteront préoccupées.

En Tanzanie, même avant cet ultimatum, les réfugiés burundais étaient régulièrement rapatriés de force, une réalité que le HCR n’a pas mentionnée dans sa déclaration. Celle-ci s’est uniquement focalisée sur l’ultimatum de rapatriement forcé. Pourtant, ces rapatriements se déroulent dans des conditions mettant en péril la vie des réfugiés, au point que ces derniers préfèrent rentrer plutôt que de mourir sur place.

En réponse à cette situation inhumaine et invivable, nous, les organisations signataires, demandons ce qui suit :

Au Gouvernement Tanzanien :
▪ Garantir la sécurité et la dignité des réfugiés burundais. Toutes les mesures coercitives visant à les rapatrier de force doivent cesser immédiatement. Le gouvernement tanzanien doit respecter les conventions internationales sur les droits des réfugiés, en particulier le principe de non-refoulement, et assurer un environnement sûr et digne pour tous les réfugiés sur son territoire.

Au Haut Commissariat des Réfugiés en Tanzanie de :
▪ Se conformer strictement à la loi et défendre, sans complaisance, les droits des réfugiés burundais en résistant aux influences politiques.
▪ Garantir la réinstallation dans d’autres pays pour les réfugiés burundais qui le souhaitent, en créant un corridor humanitaire et en assurant des conditions dignes et sécurisées.

A la Communauté Est Africaine (EAC) d’ :
▪ Utiliser tous les pouvoirs à sa disposition pour préserver les droits de ses citoyens en empêchant la Tanzanie de violer les droits des réfugiés burundais se trouvant sur son territoire. La EAC doit rappeler à la Tanzanie les principes fondamentaux des droits des réfugiés, y compris le principe de non-refoulement, afin d’assurer la
protection et le respect des droits de ces individus vulnérables conformément aux normes internationales et régionales en vigueur.

A l’Union Africaine (UA) d’ :
▪ Exiger, via sa Commission des droits de l’homme et des peuples, le respect de la Convention de Kampala relative à la protection et à l’assistance des personnes déplacées en Afrique. L’UA doit intervenir pour s’assurer que la Tanzanie respecte ses obligations envers les personnes déplacées et réfugiées, en mettant en œuvre
les mesures nécessaires pour garantir leur protection et assistance conformément à cette convention.

À la communauté internationale d’:
▪ Exercer une pression déterminante sur le gouvernement tanzanien pour qu’il sursoie immédiatement à la politique de rapatriement forcé des réfugiés burundais prévue pour décembre 2024.
▪ Inciter le gouvernement tanzanien à respecter ses engagements internationaux, avec la possibilité de sanctionner les responsables de ces abus.

Aux pays et autres organismes contributeurs de l’aide aux réfugiés dans le monde de :
▪ Revoir à la hausse l’aide destinée à tous les réfugiés se trouvant dans la région des Grands-Lacs afin d’améliorer leurs conditions de vie et de subvenir à leurs besoins minimums de base, car ils vivent actuellement dans une précarité inouïe nécessitant un soutien urgent.

Aux ONG et aux organismes de défense des droits humains de :
• Intensifier la surveillance en documentant systématiquement les abus et en publiant régulièrement des rapports détaillés sur les violations des droits humains subies par les réfugiés.
• Continuer à fournir une aide humanitaire complète et diversifiée aux réfugiés burundais, en couvrant leurs besoins essentiels tels que la nourriture, l’eau, les soins médicaux, l’éducation et le logement, et en travaillant à améliorer leurs conditions de vie et leur bien-être général.

Aux médias locaux et internationaux de :
• Maintenir une couverture constante et approfondie de la situation des réfugiés burundais en Tanzanie, afin d’informer et d’alerter l’opinion publique nationale et internationale.
• Encourager une réponse internationale urgente, coordonnée et efficace pour remédier à cette crise humanitaire.

Signée le 28 mai 2024
Les 19 organisations signataires :
1. Action des Chrétiens pour l’abolition de la torture au Burundi (ACAT Burundi)
2. Association des Journalistes Burundais en Exil (AJBE)
3. Association burundaise pour la protection des droits de l’homme et des personnes détenues (APRODH)
4. Coalition Burundaise des Défenseurs des Droits de l’Homme (CBDDH)
5. Coalition burundaise des défenseurs des droits de l’homme vivant dans les camps des réfugiés (CBDH/VICAR)
6. Coalition Burundaise pour la Cour Pénale Internationale (CB-CPI)
7. Coalition de la société civile pour le monitoring électoral (COSOME)
8. Collectif des Avocats pour la défense des Victimes de crimes de droit International commis au Burundi (CAVIB)
9. Ensemble pour le soutien des défenseurs des droits humains en danger (ESDDH)
10. Forum pour la Conscience et de Développement (FOCODE)
11. Forum pour le Renforcement de la société civile au Burundi (FORSC)
12. Light for all
13. Ligue ITEKA
14.Mouvement INAMAHORO
15.Mouvement des femmes et filles pour la Paix et la Sécurité au Burundi (MFFPS)
16. Réseau des Citoyens Probes (RCP)
17. SOS Torture-Burundi
18. Tournons la Page-Burundi (TLP-Burundi)
19. Union Burundaise des Journalistes (UBJ)

 

Télécharger la Déclaration conjointe en anglais

Télécharger la Déclaration conjointe des organisations de la société civile burundaise en français

TANGAZO LA PAMOJA LA ASASI ZA KIRAIA KUTOKA NCHINI BURUNDI KISWAHILI

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